Final Fight
Genre :
Baston
Editeur : Capcom
Année de sortie : 1989
Support : Arcade et consoles
Dans ce bourre-pif psychanalytique et politique anxiogène, Haggar, une sorte de Fidel Castro musculeux, cumule deux fonctions : il est maire d'une petite bourgade urbaine et catcheur pro à ses heures perdues. Suite à un appel téléphonique tonitruant, il apprend que sa fille s'est faite kidnapper par la mafia. À l'aide de ses deux compères, Guy et Cody, Haggar, qui ne perd pas le nord, va partir à la rescousse de sa progéniture et passer à tabac toutes les personnes qu'il croisera hasardeusement sur son chemin, histoire de se détendre les nerfs. Le jeu de Capcom met le doigt sur une pratique sociologique qui consiste à s'énerver injustement sur son entourage au lieu de focaliser son agressivité sur la personne concernée. Un concept qu'Orlando a baptisé intelligemment la violence de transfert, qui est une vengeance déplacée sur des personnes ou objets extérieurs au conflit. Bref, ce que l'on appelle plus communément le phénomène de souffre-douleur.
Final Fight dénonce également de manière virulente le caractère archaïque du système politique dictatorial. En effet, il met en exergue les problèmes rencontrés lorsque les pouvoirs législatif et exécutif sont incarnés par une seule et même entité. Pour simple rappel : lorsque le législatif, l'exécutif et le judiciaire sont bien distincts dans un système politique, nous avons alors à faire à une démocratie. Enfin, en théorie en tout cas. Ici tous les pouvoirs sont concentrés dans les mêmes mains (ou poings). Ainsi, monsieur le maire légifère et exécute dans la plus pure tradition des despotes de légende tels que Mao, Ceaucescu ou le très omnivore Mobutu, et on peut y admirer les résultats catastrophiques sur la société : les DJ, les hippies et même les femmes se font joyeusement démonter la gueule pour un oui ou pour un non. Après avoir distribué généreusement des mandales à la population locale, Haggar et ses hommes de main se retrouvent enfin face au boss final : un vieux bourgeois Versaillais en chaise roulante armé d'une arbalète. Ils n'hésiteront pas, malgré son handicap, à le défenestrer violemment du 10ème étage... pour se détendre. LE jeu culte de toute une génération qui a servi de cas d'école à Science Po pour expliquer la structure des régimes tyranniques à leurs étudiants les plus hermétiques.
À la manière des plus augustes despotes, Haggar légifère et exécute sa subjectivité radicale sur les premiers venus.